Le vison d'Amérique
Il est aisé de confondre Vison d’Europe et Vison d’Amérique, les deux espèces ont en effet
une fourrure de couleur identique (Boggess, 1983). Cependant il faut noter l’absence de tache
blanche bien nette et symétrique sur la lèvre supérieure chez le Vison d’Amérique. Quelques
poils blancs sont parfois observables en dessous de la truffe. Le Vison d’Amérique
possède par contre régulièrement une tache blanche asymétrique sur la lèvre inférieure
pouvant se prolonger plus ou moins sur la gorge et le cou. Des taches blanches sur le reste du
corps sont assez fréquentes.
Il existe une différence de taille et de poids entre ces espèces. Le Vison d’Amérique est
beaucoup plus long et lourd, les mâles mesurant jusqu’à 90 cm et pesant de 800 à 2000 g
(1500 g en moyenne) ; les femelles mesurent jusqu’à 70 cm et pèsent de 550 à 1000 g (800 g
en moyenne).
Enfin le Vison d’Amérique a une tête plus aplatie et plus large que le Vison d’Europe.
De même que le Vison d’Europe, le Vison d’Amérique est en grande partie tributaire de la
présence de l’eau. Il suit linéairement les cours d’eau, habitant des zones humides de toutes
sortes (lit des rivières, ruisseaux, canaux, étangs, marais, fossés, estuaires) et pouvant même
être présent en bord de mer, dans certains secteurs de côtes, en Bretagne par exemple
(Boggess, 1983 ; Wren, 1991 ; Léger et Ruette, 2005). Les mâles adultes ont en général un
plus grand territoire que les juvéniles ou les femelles, respectivement de 2630 m, de 1230 m
et de 1850 m linéaires de berge en moyenne. Les espaces vitaux nécessaires aux visons
d’Amérique semblent donc plus petits que ceux du Vison d’Europe (Linscombe et al., 1982).
Les déplacements les plus grands chez les visons d’Amérique semblent associés à la
dispersion des jeunes en été ou à l’automne. La densité de population varie avec l’habitat, la
disponibilité alimentaire et la compétition avec les autres espèces comme les loutres
(Linscombe et al., 1982).
Le Vison d’Amérique est un animal carnivore, prédateur généraliste et opportuniste, bien
adapté à la chasse aquatique et la chasse terrestre. Les proies habituellement rencontrées dans
son alimentation incluent les mammifères (musaraignes, campagnols, surmulots et parfois rats
musqués), les poissons, les oiseaux (foulques, poules d’eau, canards colverts…), les
amphibiens, les crustacés (écrevisses), les insectes et les reptiles (Linscombe et al., 1982 ;
Boggess, 1983 ; Wren 1991 ; Léger et Ruette, 2005). Le régime alimentaire varie en fonction
du lieu de vie de l’animal et de la saison.
L’activité dépend du sexe et de la saison. Dunstone (1993) a observé que les mâles et les
femelles sortent un peu moins de trois heures par jour en moyenne tout au long de l’année. Ils
passent le reste du temps dans le nid où ils sont inactifs. Les mâles ont un comportement plus
nocturne que les femelles. Pendant la période de rut, les deux sexes sont actifs à des moments
différents de la journée : le mâle, actif de cinq à six heures par jour, préfère le crépuscule et
l’aube, tandis que la femelle présente un peu plus de trois heures d’activité qu’elle partage
équitablement entre le jour et la nuit. De mai à juin, les périodes d’activité des deux sexes
sont d’environ trois heures quotidiennes. La femelle a alors une activité majoritairement
diurne, tandis que le mâle est nocturne. D’août à octobre, le mâle a une activité
majoritairement crépusculaire et la femelle montre une activité plus élevée que pendant le
reste de l’année. De novembre à janvier, les périodes d’activité des deux sexes sont
indissociables et ont lieu surtout la nuit. Environ 90 % du temps d’activité est consacré à la
chasse tandis que le temps restant est consacré à la défense du territoire (Dunstone, 1993).
La période de reproduction a lieu une fois par an de fin janvier à début avril, la période de rut
commençant fin février (Ternovskii, 1977 ; Linscombe et al., 1982 ; Boggess, 1983 ;
Bonnefond, 1985 ; Mead, 1989 ; Wren, 1991 ; Douglas et al., 1994 ; Dunstone, 1993 ;
Sidorovich, 1993). On observe de mi-novembre à début mars, une augmentation progressive
de la taille et de l’activité fonctionnelle des testicules et des épididymes, puis une régression
après avril (Linscombe et al., 1982). Quand la saison de reproduction approche, l’activité
physique générale des animaux augmente. Les mâles voyagent loin, cherchant des femelles
pour l’accouplement (Linscombe et al., 1982 ; Dunstone 1993). Quand la fin de la saison de
reproduction approche, il y a de moins en moins de femelles réceptives, la compétition est
donc intense entre les mâles pour celles qui sont encore en chaleur. Les mâles sont alors
obligés de se déplacer plus loin de leur territoire pour trouver des possibilités d’accouplement
(Dunstone, 1993).
L’oestrus est plus de type mono- oestrus que chez le Vison d’Europe. Pendant la période de
rut, une fois qu’une femelle est entrée en oestrus, elle reste réceptive au mâle à tout moment de
la saison de reproduction jusqu’à l’accouplement et peut accepter plusieurs accouplements
durant cette période de réceptivité (Dunstone, 1993 ; Amstislavsky et Ternovskaya, 2000).
L’ovulation est induite par l’accouplement, même au cours de la gestation (Linscombe et al.,
1982 ; Mead, 1989 ; Dunstone, 1993). Si les follicules ont atteint une taille suffisante, il y a
ovulation suite au coït dans les 33 à 72 heures (Linscombe et al., 1982 ; Bonnefond, 1985 ;
Dunstone, 1993 ; Amstislavsky et Ternovskaya, 2000). Il semblerait que ce soit la stimulation
du vagin par le pénis qui soit à l’origine de l’ovulation. Mais des corps jaunes ont été observés
sur les ovaires de femelles ne s’étant pas reproduites, indiquant que l’ovulation peut avoir lieu
spontanément, sous certaines conditions, suite à un simple contact avec un mâle, ou au
combat précédant l’accouplement lors de la parade nuptiale (Dunstone, 1993 ; Amstislavsky et Ternovskaya, 2000).
La femelle se réaccouple habituellement six à dix jours après le premier accouplement. Une seconde ovulation
pouvant produire des ovocytes fécondables a lieu seulement si l’intervalle entre deux accouplements successifs
est d’au moins sept jours (Linscombe et al., 1982 ; Mead, 1989 ; Douglas et al., 1994). La plupart des animaux ovulent
alors en réponse à ce deuxième accouplement (Mead, 1989). Il existe ainsi une superfoetation
et une super-fécondation (Linscombe et al., 1982 ; Dunstone 1993). La superfoetation
correspond à l’implantation d’une nouvelle portée alors que l’utérus contient déjà une portée
en développement. La super-fécondation a lieu lorsqu’après une première fécondation un
deuxième accouplement provoque une nouvelle ovulation permettant ainsi de nouvelles
fécondations de différents ovules par différents mâles et l’existence de portées à pères
multiples. Si une femelle est saillie plus d’une fois avant l’ovulation, c’est habituellement le
sperme du dernier mâle qui féconde le plus grand nombre d’ovocytes (Dunstone, 1993). De
même, si une femelle a été fécondée par un ou plusieurs mâles et qu’elle s’accouple avec un
autre mâle six à dix jours plus tard, le dernier mâle est le père de la majorité des petits nés.
Ceci est dû au fait que le nombre d’ovocytes fécondés est plus élevé que le nombre
d’embryons qui peuvent s’implanter et se développer et les derniers ovocytes fécondés ont le
plus de chance de survie (Dunstone, 1993). La paternité finale de la portée ne sera définie que
lorsque la femelle arrêtera d’ovuler (Dunstone, 1993). Les visons sont polygames (Boggess,
1983). Les caractéristiques physiologiques de la femelle l’adaptent à des paternités multiples.
La polyandrie dans cette espèce doit plus résulter du comportement de la femelle, par un
choix actif de sa part, que de contraintes exercées par les mâles, les femelles s’opposant
parfois aux accouplements (Thom et al., 2004c).
Lorsqu’un mâle se trouve dans le voisinage d’une femelle en chaleur, il manifeste son intérêt
par l’émission de cris étouffés qui semblent avoir une fonction de contact (Dunstone, 1993) ;
quand ils sont sexuellement excités, mâle et femelle émettent des vocalises qui ressemblent à
de petits rires (Linscombe et al., 1982). Le mâle contrôle tout d’abord les régions qui ont été
marquées par la femelle et fréquemment il marque l’endroit à son tour avec ses sécrétions
glandulaires et son urine. Alors la parade nuptiale commence réellement, en général avec un
violent combat : le mâle agrippe la femelle dans le bas du cou et avec l’aide de ses pattes
arrières et de son corps essaie de la mettre en position pour l’accouplement en piétinant ses
hanches et en essayant de redresser son dos arqué pour permettre le coït. Si la femelle est en
chaleur, après une lutte de durée variable, elle est alors réceptive et autorise la pénétration en
cambrant le dos, courbant sa queue sur le côté et adoptant une position de lordose (Linscombe
et al., 1982 ; Bréfort, 1983 ; Dunstone, 1993). Le mâle peut infliger de sévères blessures à la
femelle durant l’accouplement (Dunstone, 1993). Des croûtes et des poils blancs sont souvent
observés sur la surface dorsale du cou des femelles s’étant récemment accouplées (Linscombe
et al., 1982).
Les accouplements peuvent être longs (Linscombe et al., 1982 ; Dunstone, 1993), de une à
trois heures (Ternovskii, 1977 ; Enders, 1952 ; Dunstone, 1993). Le pénis ne présentant pas
de corps intumescent comme chez les canidés, la pénétration peut être interrompue à
n’importe quel moment. Il semble que durant les accouplements prolongés, le mâle éjacule
plusieurs fois (Linscombe et al., 1982). Des périodes d’activité suivies de périodes de repos
de plusieurs heures ne sont pas inhabituelles (Linscombe et al., 1982). Les mâles les plus
grands ainsi que les mâles en fin de saison de reproduction s’accouplent pendant plus
longtemps, augmentant ainsi peut-être leur chance de paternité par un plus grand transfert de
sperme ; la durée de l’accouplement est ainsi probablement sous le contrôle des mâles
(Dunstone, 1993 ; Thom et al., 2004c).
Les mises bas ont lieu de fin avril à mi-juin (Linscombe et al., 1982 ; Boggess, 1983 ;
Dunstone, 1993 ; Sidorovich, 1993 ; Bäcklin et al., 1997), à raison d’une seule portée par an
(Boggess, 1983 ; Dunstone, 1993), comptant de un à dix jeunes ou plus, quatre en moyenne
dans le milieu naturel (Linscombe et al., 1982 ; Boggess, 1983 ; Wren 1991 ; Dunstone,
1993 ; Sidorovich, 1993) et de cinq à cinq et demi en moyenne dans les élevages chez les
multipares (Pilbeam et al., 1979 ; Bäcklin, 1996 ; Elmeros et Hammershøj, 2005 ; Liabeuf,
2005) et trois à quatre en moyenne chez les primipares (Pilbeam et al., 1979 ; Elmeros et
Hammershøj, 2005) (tableau I).
Le taux de mortalité des jeunes durant l’allaitement est de 21 % en milieu naturel (Sidorovich,
1993).
Les petits naissent sourds, aveugles et glabres. De 8 à 10 g à la naissance, ils croissent vite
pour atteindre les 100 g au cours du premier mois (Linscombe et al., 1982 ; Wren, 1991). La
fourrure apparaît après la première semaine, celle-ci s’allonge et s’épaissit et forme le
manteau juvénile à la fin du premier mois. Les dents apparaissent aux 18-21èmes jours, avec un
remplacement complet aux 62-72èmes jours (Dunstone, 1993). Les yeux s’ouvrent entre cinq et
six semaines d’âge (Linscombe et al. 1982 ; Boggess, 1983), les petits sont alors plus mobiles
et sortent parfois du terrier. La croissance rapide des petits nécessite une bonne production
laitière de la mère. Ils grandissent rapidement, atteignant 40 % de leur poids adulte et 60 % de
leur taille à environ sept semaines (Linscombe et al., 1982 ; Wren, 1991). A partir de trois à
quatre semaines, la mère commence à leur apporter quelques proies. Alors que le taux de
croissance est le même pendant les deux premiers mois, soit durant l’allaitement, les mâles
ont ensuite un taux de croissance plus élevé que les femelles. Les petits sont très joueurs,
s’attaquant constamment les uns les autres, ils deviennent autonomes en août (Dunstone,
1993). La portée se sépare au début de l’automne (Linscombe et al., 1982 ; Sidorovich, 1993 ;
Wren, 1991).
http://www.furets-visons.com/t4167-visons-d-amerique.htm